lundi 14 juillet 2008

Un dimanche aux saveurs historiques



Ambohitrimanjaka, 13 juillet 2008

En cette journée de dimanche, nous devions bien la commencer à l'église catholique. Accompagnées d'Élisé et de sa famille, nous sommes parties vers 7h00. Par la suite, vers 8h30, nous nous sommes rendues au marché d'artisanat à plus de 45 minutes de marche où nous avions rendez-vous avec Alain, le fils de Manitrala. Notre rendez-vous était à 10h00, alors bien sûr, nous y étions au moins vers 9h30. Encore encrées dans nos valeurs familiales et notre peur d'arriver en retard et de faire attendre l'autre, nous avons été une fois de plus confrontées à la notion du temps malagache: il est arrivé à 11h00. À part cette petite mésaventure, le reste de la journée fut très intéressant et enrichissant.

Nous avons mangé chez lui et sa famille un repas traditionnel malgache et avons eu la chance de regarder des émissions en français. La joie quoi! Une fois terminée, il nous a conduit dans une autre commune, au centre même de l'histoire de la ville et de la province d'Antananarivo: au premier château du roi. Une fois sur les lieux, nous étions au plus haut sommet de tout Madagascar. Autour de nous, s'érigeait de belles collines, dont les 11 autres montagnes qui composent la province et une vue incroyable sur les alentours de la ville. Malgré que nous aimons beaucoup l'histoire, nous ne vous ferons pas l'historique complet du pays,mais voici un bref résumé.

En fait, le premier roi (règnant de 1787-1810), soit Andianampoinimerina, a choisi d'ériger son modeste palais au point le plus élevé des hautes-terres du Madagascar. Face à cette montagne, il avait une vue sur les 11 autres montagnes des hautes-terres, où il érigea un petit palais sur chacune afin d'installer une de ses 12 femmes officielles. Bref, au sommet des 12 montagnes qui représentent les frontières de la province d'Antananarivo, un palais était gardé par une de ses femmes. À partir de ce moment, le chiffre 12 devint sacré pour les Malgaches et les montagnes devinrent sacrées, et ce, encore aujourd'hui. La femme qu'il préférait vivait, bien sûr, au sein de son palais principal et était considérée comme la reine première.

Également, nous avons été à même de réaliser la logique de l'architecture malgache. En effet, même de nos jours, les nobles construisent leur maison en respectant les différents aspects qui composent l'astrologie malgache. Le nord-est de la maison représente l'endroit sacré, car il est réservé à la mémoire des ancêtres. Donc, les sacrifices, les prières, les photos des morts (qu'ils ne considèrent pas réellement mort) se déroulent toujours à cet endroit. Le Nord représente le pouvoir, donc l'homme de la maison se retrouve généralement à ce point cardinaux autour de la table et sa chambre à coucher est également situé en suivant cette logique. Les fenêtres se trouvent toujours à l'est pour le lever du soleil et à l'ouest pour le coucher du soleil. Également, la porte se trouve, selon cette tradition architecturale, au sud-ouest. Le sud représentant la soumission et l'ouest représentant le départ (coucher du soleil). Alors, si vous interprétez ce message et que vous êtes invités dans une demeure d'un noble malgache, vous devez savoir vous faire reconnaissant de son statut supérieur au vôtre et vous devez également savoir repartir avant qu'il ne vous montre la porte (bon, ce n'est pas une interprétation scientifique, mais c'est quand même ce message que ce signe désire lancer aux invités).

Étrangement, malgré l'arrivée de d'autres religions très importantes au Madagascar après la colonisation, les rythes traditionnels sont toujours et encore pratiqués. Effectivement, même si les gens se considèrent catholiques ou protestants, la vénération des ancêtres en sacrifiant des animaux (poulet, canard, oie et autres volailles) ou en déposant des offrandes sur les lieux sacrés, qui font toujours parties du décor malgache de nos jours, sont toujours pratiqués. Ce double culte mélange donc les pratiques traditionnelles datant d'avant la colonisation française qui s'est produite en 1895 et les pratiques actuelles qui prennent leurs racines principalement dans le christianisme et l'islamisme.

Est-ce un signe profond de reconnaissance envers leur passé? Est-ce un signe d'un manque de compréhension en ce monde? Est-ce tout simplement des valeurs traditionnelles qui se sont transmises de génération en génération et dont les gens n'osent pas remettre en question? Nul ne le sait, mais une chose est certaine, c'est que ces 12 montagnes sont toujours considérées comme sacrées et que la vénération des ancêtres et les pratiques parfois douteuses qui accompagnent ces croyances sont toujours actuelles et représentent des éléments très importants de la culture malgache.

Cette visite a été extrêmement enrichissante et ce ne sont que quelques brides de ce que nous avons appris aujourd'hui que nous vous avons partagées via ce billet. Nous avons été témoin, à travers cette visite, de toute l'histoire de cette riche société aux influences asiatiques, africaines et européennes qui ont teintées et formées la société actuelle.

Cette visite vaut plus que toutes les lectures que nous aurions pu réaliser sur l'histoire du Madagascar.

En espérant que le souhait du roi d'Andrianampoinimerina de voir se regrouper les habitants des sommets des 12 collines sacrées se réalise.

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